Faire respecter en pratique des recommandations nutritionnelles théoriques n’est déjà pas chose facile sur Terre. Mais la difficulté augmente encore lorsqu’il s’agit de donner des conseils nutritionnels et alimentaires à des astronautes se rendant sur Mars. Tel est le défi qui a été lancé à une équipe d’experts de l’agence spatiale européenne avec parmi eux, Serge Pieters, Consultant en Nutrition pour l’European Space Agency.
Physiopathologie spatiale
Un voyage dans l’espace, surtout s’il est de longue durée, ne se fait pas sans encombres au niveau physiologique. Les astronautes reviendront en effet sur terre avec de nombreuses conséquences physiopathologiques. Un voyage dans l’espace de courte durée (<15j) entraîne déjà de nombreux désagréments tels que la cinétose spatiale (mal des transports), des perturbations neurosensorielles, des modifications et changements hématologiques, une fonte musculaire, de l’anémie, des insomnies, des perturbations digestives...
Le voyage à destination de Mars va quant à lui induire chez les astronautes, en plus des conséquences déjà citées, une décalcification osseuse, un risque accru de calculs rénaux, des perturbations immunologiques, des troubles psychologiques, une carcinogenèse accrue, sans oublier une exposition prolongée aux radiations solaires. Il va donc falloir trouver des solutions pour pallier au mieux toutes ces perturbations physiologiques et préserver de façon optimale la santé des futurs astronautes.
Contraintes alimentaires
Plusieurs problèmes vont se poser quant à l’alimentation et aux apports nutritionnels des explorateurs spatiaux en ce qui concerne leur future expédition sur la planète rouge. Ils vont en effet souffrir de perturbations corporelles et sensorielles au cours de ce voyage. La perte de masse maigre, la décalcification osseuse, le mal du transport et les perturbations du goût (les aliments sont moins en contact avec la langue vu qu’ils flottent dans la bouche) vont faire que les apports nutritionnels des explorateurs vont rapidement chuter. Ils perdront en moyenne entre 5 et 10% de leur poids. Il sera donc très difficile pour eux de couvrir l’entièreté de leurs besoins nutritionnels quotidiens.
Un autre problème va également se poser : l’acheminement de vivres et d’oxygène dans l’espace. Il faut savoir qu’envoyer un kilo de nourriture, d’eau ou d’oxygène dans l’espace est très coûteux (entre 1000 et 1500 €). Or, un être humain consomme quotidiennement 5 kg d’oxygène, d’eau et de nourriture. Pour une durée de deux ans, cela représenterait donc un coût de près de 5.500.000 € par astronaute. De plus, il ne faut pas oublier le poids et le volume considérables que représenteraient deux ans de vivres et d’oxygène.
Projet MELISSA
Afin de pallier aux nombreuses contraintes liées au voyage vers Mars et permettre aux astronautes d’évoluer en quasi autonomie, un projet audacieux a vu le jour : le projet MELISSA (Micro-Ecological LIfe Support System Alternative). Il a été conçu comme un écosystème artificiel basé sur des micro-organismes (notamment des cyanobactéries) et des plantes supérieures.
Le but de ce projet est de développer des technologies permettant de construire des systèmes de support de vie pour des missions spatiales au long cours. Pour ce type de mission, il faut absolument un système de recyclage des déchets et produire les aliments et l’oxygène nécessaires à la vie des astronautes.
Grâce au projet Melissa, il va être possible aux astronautes de recycler leurs déchets alimentaires et corporels afin de les rendre réutilisables. De plus, les explorateurs seront capables de faire pousser des aliments de bases en culture hydroponique (sans sol naturel). Les astronautes auront donc à leur disposition du blé, du riz, du soja, des pommes de terre, des oignons, de la laitue, du choux frisé, des tomates et des épinards. De la spiruline viendra également compléter leur menu.
Ces aliments de base devraient permettre de couvrir environ 40% des besoins nutritionnels de nos voyageurs spatiaux. De plus, par transformation, ils pourront extraire l’huile et la farine des céréales (soja, froment), en extraire le jus (lait de soja) et ainsi varier leur ordinaire. Pour l’assaisonnement, le sel sera extrait des urines et le poivre pourrait être disponible sous forme d’arômes. Des chefs réputés sont actuellement en train de plancher sur des recettes martiennes afin de permettre aux astronautes de consommer des repas appétissants. Ainsi, les futurs explorateurs pourront déguster du pain martien à la confiture de tomate verte ou encore des gnocchis de spiruline.
Recommandations spatiales
Emettre des recommandations nutritionnelles pour des astronautes n’est pas chose aisée. Les faire respecter est encore plus difficile. Or, dans l’espace, consommer 300 kcal par jour en plus ou en moins peut engendrer des conséquences graves. De plus, il faudra également tenir compte des contraintes durant le vol et une fois sur notre planète voisine, comme par exemple en ce qui concerne la synthèse cutanée de vitamine D. Voici, à titre d’information, les recommandations nutritionnelles en matière de macronutriments qui ont été fixées pour les futurs voyageurs spatiaux:
Ces recommandations ne diffèrent pas beaucoup des recommandations terrestres si ce n’est que, comme dit précédemment, elles devront être scrupuleusement respectées afin de préserver un état de santé optimal chez les futurs astronautes en route vers Mars.
Alexandre dereinne, diététicien
European Space Agency. Prêt pour un dîner sur Mars? www.esa.int . 2005.
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Article en français consulté en décembre 2010.
Nedelec G. Recommandations concernant la nutrition de l’équipage d’une mission martienne. 2002.
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Article en français consulté en décembre 2010.
Pieters S. De Youri Gagarine aux premiers pas sur Mars: l’évolution de l’alimentation spatiale et son impact sur l’alimentation terrestre. 13e Congrès de Nutrition et Santé. Bruxelles. Novembre 2010.
Université Blaise Pascal. Aurora space food preparation and process optimisation. Decembre 2002.
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Présentation en anglais consultée en décembre 2010.
Wilmotte A. Cyanobactéries et projet spatial MELISSA. 2002.
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Article en français consulté en décembre 2010.