Les enfants qui excluent les produits laitiers de leur alimentation ont un risque fracturaire accru. Ce risque peut alors demeurer élevé à un âge plus avancé. De nombreuses études d’intervention ont démontré l’intérêt des produits laitiers dans l’accumulation du capital osseux au cours de la croissance.
Des nutriments spécifiques
Afin d’acquérir un capital osseux optimal, plusieurs nutriments doivent être apportés dans des quantités adéquates. Ces nutriments entrent en interaction avec des systèmes hormonaux et des ensembles de cytokines qui régulent la formation et la résorption osseuse.
Parmi ces nutriments figurent la vitamine D, qui influence la production de la parathormone PTH) et le calcitriol activé ou 1,25-dihydroxyvitamine D (1,25D), sa forme active.Tous deux sont des facteurs qui contrôlent les flux intestinaux et rénaux du calcium (Ca) et du phosphate inorganique (Pi), constituants essentiels du tissu osseux. L’effet bénéfique des apports calcique et vitaminique D pour la santé osseuse est aujourd’hui bien établi. Il s’exerce indépendamment de l’âge.
Les protéines représentent un troisième nutriment spécifique. Grâce à leur effet sur la production de l’IGF-I (Insulin-like Growth Factor), elles sont indispensables à l’acquisition et au maintien d’un bilan osseux positif.
Tout se joue dans l’enfance
Il apparaît, selon plusieurs études, que le gain de masse osseuse est proportionnel à la quantité de protéines alimentaires ingérées, même après ajustement pour les apports calciques. Cette association positive est surtout observée avant la puberté.
Il semble également que les apports protéiques puissent moduler les effets du calcium sur le gain de masse osseuse, en particulier chez les garçons pré-pubères. En effet, le bénéfice osseux d’une supplémentation en calcium n’interviendrait que chez les garçons ayant des apports protéiques spontanés inférieurs à la médiane. Au-dessus de cette dernière, la différence ne serait plus significative, suggérant même que pour des apports protéiques élevés, les besoins spécifiques en calcium pour une croissance optimale pourraient être moindres. Une autre étude a été menée auprès d’enfants et adolescents âgés de 6 à 18 ans. Leurs apports nutritionnels ont été enregistrés de manière annuelle pendant une durée de 4 ans. Cette étude a démontré que la taille et la masse des os de l’avant-bras, mesurées par scanner, de même que l’évaluation indirecte de la résistance aux fractures, étaient positivement corrélées aux apports protéiques. Il n’existe actuellement pas d’étude d’intervention réalisées avec un supplément protéique, afin de déterminer si la corrélation mentionnée ci-dessus est une simple association ou une relation causale.
Un autre effet bénéfique pour la santé osseuse attribuable aux protéines alimentaires est la stimulation de la production hépatique d’IGF-I. Cette hormone augmente la croissance osseuse, tant longitudinale que radiaire et stimule la réabsorption tubulaire du phosphore et la synthèse rénale de calcitriol, ce qui conduit donc à une absorption intestinale plus élevée de calcium et de phosphore. Elle contribue donc à assurer un environnement minéral adéquat pour la minéralisation du tissu osseux nouvellement formé.
D’où l’intérêt des produits laitiers
Les produits laitiers représentent des alliés de choix dans la construction du capital osseux chez l’enfant. En effet, cette catégorie d’aliments contient de nombreux nutriments nécessaires à sa formation et qui plus est, dans de bonnes proportions. De plus, la littérature scientifique regorge d’études transversales et longitudinales attribuant à la consommation de produits laitiers des effets favorables sur la santé osseuse et inversement, tandis que d’autres études relient une carence en produits laitiers au cours de l’enfance à une prédisposition accrue aux fractures à un âge avancé.
Il semble qu’il existe une association positive entre le gain osseux, le capital osseux maximal à l’âge adulte, les dimensions osseuses et la stature d’une part, la consommation de produits laitiers d’autre part. Le calcium influencerait principalement le remodelage osseux, ainsi que la densité volumique, alors que les protéines auraient, quant à elles, un effet sur le modelage de l’os, c’est-à-dire, sur sa taille. Les deux phénomènes contribueraient donc à assurer à l’enfant une meilleure solidité osseuse et une résistance mécanique accrue et le protègeraient de cette façon du risque de fractures.
Bientôt un siècle
Les premières études d’intervention portant sur l’impact de suppléments de lait datent de la fin des années 1920. Dans une étude menée en Angleterre, environ un demi litre de lait a été fourni quotidiennement à des enfants dans plusieurs écoles. Cette supplémentation a entraîné chez les bambins un gain de taille significatif par rapport à ceux n’ayant pas bénéficié de ces suppléments lactés.
De très nombreux essais ont confirmé par la suite les bénéfices des produits laitiers sur la santé osseuse. Dans une étude randomisée et contrôlée, par exemple, des jeunes filles âgées de 12 ans ont reçu une pinte de lait, soit 568 ml pendant un à deux ans. En comparaison avec le groupe contrôle, ces jeunes filles ont acquis davantage de masse minérale osseuse, en particulier au niveau de leurs membres inférieurs, ainsi que des taux sériques d’IGF-I plus élevés. Il semble également que, contrairement à du calcium pris sous forme de comprimés, un supplément de calcium par le biais de la consommation de fromage augmente la masse d’os cortical. D’autres études encore suggèrent l’existence d’un effet sur le remodelage osseux, imputable aux produits laitiers. En effet, lors d’un essai, le diamètre des os métacarpiens était augmenté de manière significative au bout de deux ans chez des enfants chinois recevant un supplément de lait, par rapport à un groupe contrôle n’en consommant pas.
Il apparaît donc clairement que les produits laitiers se démarquent largement de simples suppléments en nutriments isolés et qu’ils jouent un rôle certain dans la constitution de la masse osseuse. Leur consommation devrait donc être encouragée tout au long de la vie afin d’entretenir le capital osseux et a fortiori au cours de la puberté, période à laquelle il est constitué.
Alexandre Dereinne, diététicien
Bonjour J-P. Protéines: un rôle essentiel pour la santé osseuse.
Cholédoc 83. Mai/juin 2004.
Téléchrger le PDF ( Cerin.org )
Article en français consulté en février 2010.
Rizzoli R. Produits laitiers et croissance osseuse. Communication de l’Académie Nationale de Médecine (France). 2009.
Téléchrger le PDF ( santépratique.fr )
Article en français consulté en février 2010.