A la mi-janvier 2000, lors d’une réunion du Royal College of Physicians à Londres, un consensus a été adopté. Selon celui-ci, l’alimentation traditionnelle, la consommation de légumes et de fruits, de légumineuses, de noix et de pain complet, associés à l’huile d’olive comme source principale de matières grasses, a un effet positif sur l’incidence des affections cardiovasculaires, le cancer et le diabète. En quoi l’alimentation méditerranéenne est-elle si particulière ? Pourquoi apporte-t-elle des garanties supplémentaires en matière de prévention cardiovasculaire? Comment devrions-nous modifier nos habitudes alimentaires afin d’avoir un profil alimentaire proche de celui des pays méditerranéens ? Voici une explication. Il faut tout d’abord noter que le terme de « pays méditerranéen » englobe une vingtaine de pays localisés aussi bien sur le pourtour méditerranéen qu’en pleine mer et comprend donc également Chypre, la Syrie, l’Egypte, l’Albanie, la Tunisie, la Turquie, ...
Une fois par mois
Depuis que le phénomène du « paradoxe français » a été décrit en 1992, les chercheurs se sont focalisés sur la compréhension des particularités permettant de l’expliquer. Dans une récente publication sur le « state of the art » (1), les auteurs indiquent que la mortalité consécutive à une affection cardiovasculaire a diminué de 9 % chez les personnes dont le profil alimentaire est similaire à celui des pays méditerranéens. Cette approche diététique est bénéfique dans la prévention d’autres pathologies telles que le cancer (risque relatif ou RR de 0,94), la maladie d’Alzheimer et le Parkinson (RR de 0,87) mais aussi de la mortalité totale (RR de 0,91). Le projet HALE (2) démontre que la mortalité sur une période de 10 ans diminue de 60 % lorsqu’un ensemble d’approches sont respectées. Parmi celles-ci, on peut citer l’absence de tabagisme, la consommation modérée d’alcool, la pratique régulière d’exercices physiques et une alimentation de type méditerranéen. Il est intéressant de regarder de plus près les raisons qui permettent d’expliquer cet effet protecteur. La pyramide alimentaire méditerranéenne diffère en de nombreux points de celle qui existe en Belgique. Au sommet de la pyramide, on constate une différence capitale : la consommation de viande rouge une fois par mois seulement. La viande, comme tous les produits d’origine animale, contient du cholestérol. La viande de bœuf, bien que relativement maigre, contient environ 70 mg de cholestérol par 100 grammes. Les produits d’origine animale, en comparaison des produits d’origine végétale, contiennent plus de graisses saturées qui favorisent la synthèse du cholestérol endogène au niveau hépatique. En conséquence, l’apport journalier total en cholestérol peut atteindre 300 mg. D’autres produits d’origine animale sont relativement riches en cholestérol : les œufs (390 mg/100 g), le beurre (240 mg/100 g), le poulet (avec la peau: 80 mg/100 g; sans peau : 20 mg/100 g) et le lait entier (10 mg/100 g). Une diminution de 1 % de l’apport exogène de cholestérol diminue de 2 % le risque cardiovasculaire. En conséquence, leur consommation est particulièrement restreinte dans l’alimentation méditerranéenne.
Toutes les semaines
Les recommandations alimentaires se focalisent essentiellement sur la base de la pyramide alimentaire et non sur son sommet. Elles soulignent l’importance de limiter la consommation hebdomadaire d’œufs, de poulet et de poisson. Il existe cependant une importante distinction par rapport aux habitudes alimentaires belges: l’absence de graisses de synthèse ou de déchets issus de graisses. En ce qui concerne le poisson, il est conseillé de préférer certaines espèces, essentiellement celles qui sont riches en acides gras insaturés oméga-3. Il est donc conseillé de remplacer la viande par du poisson au moins deux fois par semaine et de ne pas consommer plus de quatre œufs par semaine également.
Tous les jours
En ce qui concerne les aliments se trouvant à mi-hauteur de la pyramide, on conseille de consommer tous les jours des produits laitiers, de l’huile d’olive, des fruits, des légumes, des légumineuses, des aliments riches en amidon (dont les pommes de terre). Il faut favoriser les produits laitiers «allégés» tels que yaourt, fromage maigre et lait. L’huile d’olive est clairement recommandée en tant que source de lipides. Elle ne contient pas de cholestérol, 77 % d’acides gras mono-insaturés et 7,5 % d’acides gras poly-insaturés. Ces lipides sont, en effet, le reflet du cholestérol sanguin. Ils diminuent le taux de LDL-cholestérol, les triglycérides et augmentent le HDL-cholestérol. Il faut cependant porter une attention particulière à l’apport énergétique de l’huile d’olive puisque 100 ml correspondent à 3766 kJ et contiennent 15 % d’acides gras saturés. La présence d’antioxydants (vitamine E et C, caroténoïdes et différents composés polyphénols) dans les légumes, les fruits, les noix, les céréales et les légumineuses sont les piliers de l’alimentation méditerranéenne. De plus, dans ces pays, on consomme du vin rouge avec modération. D’après différentes études, il semble que l’éthanol consommé chaque jour en petite quantité ait un effet positif sur les lipides sanguins et en particulier sur le HDL-cholestérol. De plus, le vin rouge contient des antioxydants tels que des polyphénols (quercétine, epicatéchine, transvératrol) dont on sait qu’ils neutralisent les radicaux libres.
La simplicité est une marque de fabrique de la cuisine méditerranéenne. Les recettes de haute voltige et ronflantes, les matières premières (beurre, lait) sont rares dans ces cuisines. De façon similaire, l’utilisation de sel est le plus souvent évitée. Les herbes et les épices telles que l’ail, le citron, le romarin, le thym, le basilic, l’origan, la sauge donnent aux aliments une saveur du Sud. L’alimentation méditerranéenne est bien plus que la combinaison de tomates à l’huile d’olive, aux crudités et au vin rouge.
La Rédaction
Références
Sofi F, Abbate R, Gensini GF et al. Adherence to Mediterranean diet and health status: meta-analysis. BMJ 2008, 337: a1344. Knoops KT, de Groot LC, Kromhout D et al. Mediterranean Diet, Lifestyle Factors, and 10-Year Mortality in Elderly European Men and Women; The HALE Project JAMA 2004; 292: 1433-9.