Diarrhée et croissance ne font pas bon ménage

20/07/2008
Article

Les infections intestinales d’origine bactérienne, virale ou parasitaire causent beaucoup de dégâts au niveau de la fonction intestinale, avec ou sans apparition de diarrhée. Les agents pathogènes entériques responsables de la majorité des diarrhées aigues incluent les Rotavirus, Vibrio cholerae, Shigella spp, Salmonella spp, les EPEC (Enteropathogenic E.coli) et les EAEC (Enteroaggregative E. coli). La détermination de l’incidence globale et de la prévalence de chaque entéropathogène n’est pas une chose facile mais nous ne nous y attarderons pas ici. 

Transport perturbé 
La diminution de l’absorption intestinale constitue un des mécanismes des diarrhées dues à des infections par entéropathogènes. Les investigations menées sur la pathophysiologie de la diarrhée infectieuse ont permis d’élucider toute une série de processus fondamentaux de la signalisation cellulaire et du transport des électrolytes et d’établir plusieurs paradigmes mécanistiques par lesquels les agents infectieux interagissent avec la muqueuse intestinale. La diarrhée, causée aussi bien par des agents infectieux que non infectieux, résulte d’un changement dans le transport des fluides et des électrolytes au niveau du gros intestin et de l’intestin grêle. Malgré que la diarrhée soit caractérisée par perte de liquides dans les selles, le mouvement des fluides au niveau de l’intestin représente un élément secondaire au mouvement des solutés. Ainsi, l’absorption des solutés et leur sécrétion représentent les forces motrices de l’absorption nette des liquides et de leur sécrétion, respectivement. Certaines études ont examiné les effets des entérotoxines sécrétées par les organismes pathogènes sur le transport des ions. Par exemple, après fixation à la membrane apicale, la toxine cholérique CT (cholera toxin) active l’adénylate cyclase d’une manière irréversible et augmente les taux de l’AMPc au niveau de la muqueuse intestinale. La CT et l’AMPc exercent les mêmes effets au niveau des cellules épithéliales intestinales car ils stimulent la sécrétion des ions Cl- actifs en activant ou en insérant des canaux Cl- dans la membrane apicale des cellules cryptées et inhibent l’absorption neutre du NaCl en diminuant l’échange Na+/H+ et Cl-/HCO3- au niveau de la membrane apicale des villosités, mais n’altèrent pas l’absorption de Na+. La toxine A de Clostridium difficile, en stimulant la sécrétion nette d’eau et d’électrolytes, cause la diarrhée. Et l’entérotoxine NSP4 libérée par les Rotavirus et dépendant du calcium, cause des dégâts importants au niveau des villosités intestinales car elle inhibe l’absorption des dissacharides et du glucose. 

Croissance affectée
L’absorption des nutriments représente un élément nutritionnel clé durant les deux premières années de la croissance de l’enfant. L’impact de la morbidité causée par les infections à pathogènes entériques est lié à leur capacité à perturber directement l’absorption intestinale et à causer la diarrhée, lesquelles affectent le statut nutritionnel. La répétition de ces infections affecte donc le bon développement de l’enfant. Selon certaines observations non publiées, une déficience de croissance pouvant aller jusqu’à de 8,2 cm à l’âge de 7 ans a pu être attribuée à une diarrhée précoce. Cependant, d’autres effets ultérieurs sont observés sur la santé physique, sur la capacité cognitive et sur la scolarisation de l’enfant. En effet, des études ont montré que les diarrhées à répétition durant les deux premières années de vie de l’enfant peuvent causer dans certains cas une perte de quotient intellectuel et d’une année de scolarité. D’ailleurs, l’infection avec des agents entériques spécifiques comme les EAEC ou Cryptosporidium spp pourrait affecter la croissance, même en absence de diarrhée. Le cercle vicieux des infections répétées conduit à une malabsorption et à un déficit dans le développement. Des données récentes ont ouvert plusieurs opportunités capables d’interrompre ce cercle vicieux. Tout d’abord, la reconnaissance de l’impact à long terme des infections entériques répétées a augmenté considérablement l’instauration des interventions; ensuite le développement de nouvelles sondes moléculaires a permis l’identification des agents pathogènes, facilitant ainsi le traitement. Enfin, l’analyse du génome de l’hôte et des bactéries pathogènes et l’utilisation d’informations obtenues pour déterminer la susceptibilité aux infections entériques ont augmenté les potentiels d’intervention. Par exemple, l’allèle APOE4, associé au risque cardiovasculaire et à la maladie d’Alzheimer, pourrait offrir une protection contre les ravages cognitifs causés par la diarrhée. Des données ont montré que cet allèle est impliqué dans le transport de l’arginine.

La Rédaction

Prévenir et guérir
Quoi qu’il en soit, il y a toujours intérêt à limiter préventivement la fréquence des diarrhées et à réduire aussi bien leur gravité que leur durée lorsqu’elles surviennent. C’est aux parents, aux médecins et à tous les reponsables de l’enfance, d’y penser.

Références

Belaiche J. Physiopathologie des diarrhées aiguës infectieuses. Acta Endoscopica 2000; 30: 177 - 80. 

Colton CA, Czapiga M, Snell-Callanan J et al. Apolipoprotein E acts to increase nitric oxide production in macrophages by stimulating arginine transport. Biochim Biophys Acta. 2001; 1535: 134 - 44.

Petri Jr WA, Miller M, Binder HJ et al. Enteric infections, diarrhea, and their impact on function and development. J Clin Invest. 2008; 118: 1277 - 90.

Oriá RB, Patrick PD, Zhang H et al. APOE4 protects the cognitive development in children with heavy diarrhea burdens in Northeast Brazil. Pediatr Res. 2005; 57: 310 - 6.




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