En situation normale, la flore intestinale résulte d'un équilibre entre différentes bactéries, certaines étant neutres, d'autre bénéfiques et d'autres encore pathogènes. Le principe de compétition est de mise: par exemple, lorsque les bifidobactéries prolifèrent, elles induisent un environnement moins propice à la croissance des bactéries pathogènes, entre autres en abaissant le pH colique.
Une flore fragile
Certaines situations particulières, comme la prise d'antibiotiques, mettent la flore colique à rude épreuve. Les antibiotiques ont pour but d'éliminer certaines bactéries et touchent donc à l'équilibre de la flore colique. Toutefois, la prise d'antibiotiques n'est pas toujours évitable et peut détruire par la même occasion des bifidobactéries. Il peut s'ensuivre un bouleversement du pH, laissant le champ libre à certaines bactéries moins utiles, voire indésirables, qui ne seraient pas ciblées par l'antibiotique en question ou qui auraient pu développer une résistance à son encontre. Il n'est pas rare que des diarrhées surviennent suite à un tel déséquilibre ou à la prolifération d'agents pathogènes.
Le statut particulier des levures
En temps normal, les levures comptent pour moins de 1% du nombre de micro-organismes intestinaux. Toutefois, elles présentent plusieurs caractéristiques qui en font un élément probiotique des plus intéressants. Tout d'abord, elles résistent à un pH relativement acide, ce qui leur permet de survivre aux pH gastrique et duodénal acides et hostiles aux bactéries. Elles arrivent donc en nombre important dans le côlon. Enfin, un avantage indéniable des levures: elles ne sont pas touchées par les antibiotiques. Voilà pourquoi les levures constituent le probiotique de premier choix en cas d'administration d'antibiotiques. La levure probiotique S. boulardii lyophilisée (Enterol®), a fait la preuve de son efficacité pour prévenir les diarrhées liées aux antibiotiques. De plus, une méta-analyse conclut que S. boulardii est le seul probiotique efficace dans la prévention des diarrhées à C. difficile.
Focus sur Clostridium difficile
C. difficile figure parmi les bactéries pathogènes qui résistent à de nombreux antibiotiques. Cette espèce est responsable de diarrhées mais aussi d'infections nosocomiales plus graves auprès de patients fragiles comme les personnes âgées et les patients immunodéprimés. Depuis quelques années, on a identifié une nouvelle souche de C. difficile, le type 027, résistant aux céphalosporines, clindamycine et fluoroquinolones, et qui a été associée à une importante augmentation des taux de décès. Le type 027 répond moins bien au traitement classique (métronidazole ou vancomycine) et des solutions alternatives sont activement recherchées, avec un certain espoir placé du côté des probiotiques. L'efficacité de la levure S. boulardii a été démontrée pour la prévention des rechutes de diarrhées associées à C. difficile.
Par le Dr J. Andris
Références
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