Le principe fondamental d'un régime anticholestérol est d'accorder une attention particulière aux graisses ingérées. Ce geste préventif peut à lui seul prévenir l'usage du médicament. Il allie le bon usage des graisses mono-insaturées, un subtil équilibre en oméga-6 et oméga-3, ainsi qu'un contrôle rigoureux des apports en graisses saturées et en acides gras trans végétaux (obtenus lors du raffinage des huiles et après les processus industriels d'hydrogénation). Cette stratégie rencontre parfois des obstacles majeurs dans la pratique, car elle va fortement à l'encontre des habitudes alimentaires du Belge et nécessite des remises en question de son alimentation. D'autres approches, de plus en plus nombreuses, ont cependant le mérite de multiplier les moyens de lutte contre le cholestérol, facilitant ainsi pas à pas son contrôle au quotidien.
Les désormais classiques
Les matières grasses et laitages (fromages et laitages fermentés) enrichis en phytostérols ou en phytostanols constituent les fers de lance de cette nouvelle génération d'armes nutritionnelles anticholestérol. Premièrement, leurs effets sont scientifiquement prouvés. Plus de 60 études cliniques attestent que consommés en quantités adéquates dans le cadre d'un régime varié et équilibré, ils contribuent à abaisser le taux de mauvais cholestérol LDL de 10 à 15 %, sans diminuer le bon cholestérol HDL, en seulement quelques semaines. Et leur action s'ajoute aussi à celle de certains médicaments, en particulier de la classe des statines. Deuxièmement, beaucoup de ces produits ont une consommation nomade (les petites fioles, les laits fermentés) ou se tartinent sur le pain. Cette convivialité explique en partie pourquoi le marché européen explose littéralement : de 146 millions d'euros en 2005, il devrait augmenter à 312.5 millions d'euros en 2012, soit une augmentation de 114% d'après des sources officielles. Mais curieusement, suivant une récente étude menée en France, les personnes qui en ont le plus besoin ne sont pas les principaux acheteurs : seulement 15 % de la population à haut risque cardio-vasculaire en consommerait régulièrement et, pire encore, 5 % en consommerait la quantité recommandée... Leur prix est une explication possible, mais la confusion avec d'autres aliments fonctionnels comme les probiotiques en est probablement une autre.
Céréales: plus de complets
Plusieurs études prospectives et épidémiologiques étayent également d'un effet protecteur des fibres de céréales à l'égard des maladies coronaires. Début mars, à l'occasion du la 47e conférence annuelle sur l'épidémiologie et la prévention des maladies cardio-vasculaires de l'American Heart Association, des chercheurs de l'Université de Harvard ont présenté les résultats d'une analyse portant sur la consommation de céréales petit déjeuner complètes par les 10.469 médecins de la célèbre Physicians Health Study. Verdict : un bol par jour permettrait de diminuer de près de 27 % le risque d'infarctus ! Les mécanismes sous-jacents sont très variés. Mais l'effet majeur a trait à l'action hypocholestérolémiante des fibres céréalières, spécifiquement sur le LDL cholestérol. Selon les auteurs de cette étude, la moitié des apports céréaliers devraient être couverts par des grains entiers et plusieurs experts plaident pour une consommation minimale de l'ordre de 3 portions par jour. Cependant, une consommation plus modeste semble déjà donner d'excellents résultats sur la santé des vaisseaux. Dans l'étude des médecins, 2 à 6 portions par semaine réduisent le risque d'infarctus de 22 % et 1 portion hebdomadaire, déjà près de 14%.
Les combinaisons gagnantes
Autre voie, plus généraliste, qui semble porter ses fruits : l'association d'aliments reconnus pour leurs vertus anticholestérol ou régime portfolio. En 2006, déjà, l'équipe de David Jenkins à Toronto au Canada avait révélé qu'un régime combinant des protéines de soja à des amandes, des margarines enrichies en stérols végétaux, de l'avoine et du seigle, pendant 1 an, permet d'abaisser le taux de cholestérol de 20 %, soit un résultat similaire aux premières générations de statines. Ces résultats sont confortés par une nouvelle étude réalisée par des chercheurs de l'Université de Maastricht aux Pays-Bas. Menée en cross-over contre placebo sur 40 individus modérément hyperlipémique, elle indique que l'association journalière d'un muesli riche en bêta-glucanes d'avoine avec 1.5 g de stanols végétaux baisse le LDL-cholestérol de près de 10 %. Pour les auteurs de l'étude, il s'agit cependant d'une demi-victoire, car si les stanols ont un effet additionnel aux bêta-glucanes, celui-ci est limité du fait de la viscosité du muesli enrichi dans l'intestin. Une preuve par l'absurde de l'intérêt d'avoir une alimentation équilibrée plutôt que de se focaliser sur l'un ou l'autre aliment protecteur (les agrumes seraient également une autre piste à suivre, en particulier leurs flavonones), mais aussi des interactions entre les aliments.
Soja: la cuisson nuit
En dépit des dernières controverses quant à l'ampleur réelle (plus faible qu'annoncée auparavant) de son effet sur le taux de cholestérol, le soja demeure un aliment intéressant pour en assurant le contrôle au quotidien. Son action serait liée à la fois aux protéines de la graine et à sa teneur exceptionnelle en isoflavones. Avec un bémol, celle-ci est tributaire du traitement industriel ou de son usage culinaire. En effet, des agronomes scandinaves et néerlandais précisent, essai clinique randomisé en double aveugle à l'appui, que le traitement thermique à ultrahaute température (UHT) du « lait » de soja a des conséquences néfastes inattendues sur le taux du mauvais cholestérol LDL. Dans leur expérience sur 80 sujets fortement hypercholestéromiques, l'usage d'un « lait » de soja UHT s'est accompagné d'une augmentation de près de 20 % du LDL en comparaison du placebo. D'après les chercheurs, cet effet secondaire pourrait venir de la dégradation à la chaleur des isoflavones du soja. Des pertes qui, selon eux, ne seraient pas compensées par la pasteurisation, ce qui relance le débat non seulement de la gastronomie du soja et, éventuellement, de nouvelles techniques de stérilisation comme les technologies à haute pression, de plus en plus évoquées dans certains secteurs de l'industrie alimentaire.