On sait que tous les individus ne réagissent pas de la même manière à un apport sodé important. Pourtant, dans l’hypertension et dans d’autres affections cardiaques, la restriction sodée reste très pratiquée chez tous les patients. Peut-on détecter a priori quels sont les patients qui répondent et ceux qui ne répondent pas à une restriction sodée ? Malgré de très nombreuses tentatives, on n’est toujours pas parvenu à mettre au point un test rapide, pratique, fiable et reproductible permettant de prédire une sensibilité ou une insensibilité au sel. D’ailleurs, la sensibilité des sujets normotendus est variable, ce qui rend plus difficile encore l’établissement de normes.
Un vrai nœud gordien
Un des critères proposés pour rechercher une sensibilité au sel est le rapport sodium/ créatinine dans les urines de 24h. Un autre critère est celui de la variabilité tensionnelle en réponse à un apport supplémentaire en sodium. Flack et al. ont conduit pendant 24 semaines une étude contrôlée contre placebo, comprenant deux périodes avec cross-over, au cours de laquelle 112 Afro-Américains normotendus ont pris des suppléments de sodium. Ils étaient âgés de 25 à 64 ans et leur pression sanguine moyenne était de 105/70 mm Hg. Leur excrétion urinaire de sodium de 24 h était de 133,6 mmol. Le rapport moyen entre sodium urinaire et créatinine était de 0,74.
A la fin de la période test, le rapport urinaire entre sodium et créatinine avait augmenté de 37,7% et la teneur en sodium des urines avait grimpé de 26,5%. La pression systolique et la diastolique, en ambulatoire pendant 24h comme au brassard, s’étaient élevées. Mais seul l’indice de variabilité de la pression sanguine systolique, estimé et ajusté (c’est-à-dire divisé par la déviation standard calculée sur trois visites à des moments différents), affichait une bonne corrélation avec le BMI, lui-même connu pour être corrélé à la sensibilité au sel.
Mieux vaut essayer
Bref, cette variabilité ajustée semble constituer dans l’étude le meilleur étalon de la sensibilité au sel. Mais il faut reconnaître qu’il s’agit là de manœuvres peu pratiques en médecine courante et pour lesquelles il est difficile de s’assurer d’une bonne compliance du patient. Le seul intérêt de cette étude, semblent conclure ses auteurs, est d’avoir montré que la durée de la collecte des urines n’a guère d’influence sur le rapport urinaire sodium/créatinine.
De nombreuses autres tentatives ont été faites pour essayer d’arriver à un critère fiable. Mais à chaque fois, elles se sont heurtées à des difficultés du même type.
Autrement dit, il reste possible de prédire la sensibilité d’une personne donnée, mais cela implique pratiquement des tests dont l’organisation est lourde et dont la fiabilité, en raison de la faible compliance du patient, doit être considérée avec prudence. Le plus simple, en fin de compte, est de faire un test thérapeutique de restriction sodée et de vérifier l’excrétion urinaire de sodium du patient pour estimer sa compliance.
Dr Jean Andris
Références:
Comité des salines de France. Hypertension
http://www.salines.com/index.php?cat=4&mot=43
Site en français. Consulté en septembre 2005
Flack JM. New salt-sensitivity metrics: variability-adjusted blood pressure change and the urinary sodium-to-creatinine ratio. Ethn Dis. 2002;12: 10-9
Strazzullo P. Prediction and consistency of blood pressure salt-sensitivity as assessed by a rapid volume expansion and contraction protocol. Salt-Sensitivity Study Group of the Italian Society of Hypertension. Nephrol. 2000;13: 46-53.