Selon l’Organisation mondiale de la santé, une consommation faible de fruits et légumes est dans le « top 10 » des facteurs de risque pour la mortalité globale. Elle serait responsable de 31 % des maladies cardiaques ischémiques et de 11 % des accidents vasculaires cérébraux. La quantité minimale de fruits et de légumes recommandée par l’OMS est de 400 g par jour (partie comestible) ce qui peut être traduit de diverses manières, par exemple 5 portions (dans ce cas de 80 g) par jour. À noter que dans ces 400 g ne figure pas la pomme de terre. Le Dr Colin Tukuitonga (Unité de prévention primaire des maladies chroniques, OMS) précise qu’il n’y a pas de base scientifique justifiant une répartition entre les fruits et les légumes, que celle-ci est laissée à l’appréciation des différents états, en fonction de leur production, de leurs traditions, etc.
Où en sommes-nous en Belgique ? Plusieurs données suggèrent, ça et là, que de nombreux citoyens n’en mangent pas assez. C’est ce qui ressort d’une nouvelle enquête réalisée auprès de 1000 personnes représentatives de la population belge pour le compte d’Unilever Belgique.
Fruits et légumes : les habitudes en Belgique
* Il y a probablement un « effet saison » qui a joué, l’enquête a été effectuée en décembre 2004. |
La moitié des belges
Au bout du compte, on peut dire qu’avec 90 à 150 g de légumes et un fruit par jour, la moitié des belges se situe clairement en dessus du minimum des 400 g recommandés quotidiennement. Et cela ne semble pas être une surprise : à la question « Consommez-vous quotidiennement assez de fruits et de légumes ? », sept Belges sur dix répondent par la négative.
Ces données suggèrent donc que ce n’est pas le manque de connaissance le principal responsable de ce décalage entre les habitudes de consommation et les recommandations. D’ailleurs, les fruits et légumes bénéficient d’une bonne réputation. Les vitamines figurent largement en têtes des atouts qui leurs sont attribuées (88 % des cas). Elles sont suivies de la protection de l’organisme (45 %), de leur intérêt pour le régime (39 %, surtout pour les femmes). Le Sud semble plus conscient des atouts spécifiques des fruits et des légumes. Mais visiblement, la conscience ne suffit pas…
Temps perdu
A la question « pourquoi ne mangez-vous pas plus de fruits et de légumes ? », c’est le manque de temps qui arrive en tête des arguments (cité dans 31 % des cas). Suivent la conservation limitée, la saisonnalité, le goût, le coût, la disponibilité et la difficulté de préparation.
Voilà qui indique qu’un des grands objectifs de santé publique tel que la majoration de l’apport en fruits et en légumes ne peut pas être atteint uniquement par la connaissance. Le changement de comportement nécessite de se pencher sur le mode de vie dans son ensemble, en prenant en considération de nombreux aspects, à commencer par celui du temps. Bien souvent, c’est en trouvant des moyens de gagner du temps pour acheter, préparer et consommer les végétaux. C’est le cas avec le développement de la surgélation, des végétaux prêts à consommer dits de 4e gamme, de l’enceinte à micro-ondes…. Mais cela n’exclut pas non plus des actions qui viseraient à redonner du temps à des actes aussi fondamentaux que se nourrir.
Génération liquide
Signe des temps, et surtout du manque de temps, les « shots » connaissent un succès grandissant : liquides probiotiques, breuvages hypocholestérolémiants, et maintenant concentré de fruits et légumes à boire, les gestes santé passent de plus en plus par ces petites fioles dont la « potion » s’ingère en deux temps trois mouvements. Ces « shots » ne représentent pas seulement un nouveau segment de produits, c’est aussi une nouvelle façon d’avoir le sentiment d’œuvrer pour son capital santé avec un minimum d’effort. C’est une nouvelle ère qui s’ouvre, à mi-chemin entre deux extrémités : d’une part les aliments traditionnels, qui se consomment avec des couverts, à table, et, d’autre part, les suppléments qui s’avalent.
Le dernier venu dans ce Nouveau Monde (Knorr Vie), n’est pas un simple jus de fruit concentré qui aurait perdu fibres, vitamine C et autres composés intéressants. C’est le fruit de plusieurs années de recherche pour arrive à placer dans une petite bouteille de 100 ml, l’équivalent de… 200 g de fruits et de légumes.
200 % de fruits et légumes
Hormis la teneur en eau, forcément plus faible, l’équivalence nutritionnelle est étonnamment proche de celle de 200 g de fruits et légumes. Comment expliquer ce tour de passe-passe ? Le contenu est élaboré à partir de purées et concentrés de fruits et de légumes. Des pectinases sont utilisées pour faciliter l’extraction du jus, des composés aromatiques, des pigments, des nutriments et autres composés intéressants. Des techniques de concentrations douces sont appliquées (distillation et concentration à basse température, filtration sur membrane). Quelques gouttes de jus de citron et d’acerola (cerise des Indes) contribuent à la stabilité et assurent un contenu en vitamine C élevé (l’acerola est 30 fois plus concentré en vitamine C que l’orange). Et contrairement à un jus, le produit peut revendiquer l’allégation « source de fibres », puisqu’il en apporte 1,5 g pour 100 g, grâce à l’ajout de cellules de pulpes d’orange, riches en pectines
Il y a donc des arguments en faveur de la revendication provocante, à savoir qu’une petite bouteille, c’est 50 % de l’apport journalier recommandé en fruits et légumes. Nele Van Malderen (Nutritionniste de Unilever Belgique) précise cependant que le produit n’est pas destiné à remplacer les fruits et légumes, mais bien à « booster » leur consommation.
Copie conforme ?
La grande question qui se pose est de savoir si ces performances permettent véritablement de reproduire les bienfaits observés avec une alimentation riche en fruits et en légumes. Car l’équivalence nutritionnelle a ses limites. Ainsi, la répartition du type de fibres et le contenu en certains acides gras retrouvés par exemple dans les grains de fruits n’est pas identique à celle d’une alimentation diversifiée en fruits et légumes.
La densité énergétique est aussi différente : bien qu’une petite bouteille n’apporte pas plus de calories qu’une pomme (65 à 75 kcal), son contenu dans l’estomac est plus faible et sa texture plus liquide. Ces différences permettent de penser qu’une « dose » de Vie exerce un effet moins marqué sur les mécanismes de la satiété que 200 g de fruits et légumes consommés entiers. D’autant que le flacon s’avale en moins de 10 secondes, ce qui n’est pas le cas d’une pomme, d’une carotte ou d’un kiwi. Enfin, si le produit est une réussite sur le plan pratique, nutritionnel et gustatif, il ne remplace pas le plaisir de voir, toucher, sentir et croquer dans des végétaux variés.
Nicolas Guggenbühl
Diététicien Nutritionniste
D’après la conférence de presse organisée par Knorr, Bruxelles, 3 février 2005.