En dépit de l’effet hypocholestérolémiant reconnu de certains aliments, les résultats recueillis avec la fourchette sont sans pareil avec ceux obtenus via les statines. Sans compter que le cholestérol est mis à toutes les sauces avec une multitude de tisanes, gélules et autres extraits miracles qui ne font qu’entretenir le discrédit sur les approches non médicamenteuses.
Les modifications de régimes visant à agir sur les dyslipidémies sont nombreuses. Une approche qui se veut optimale concerne pratiquement toutes les familles alimentaires. Cette dispersion des compétences rend très difficile l’évaluation du potentiel hypocholestérolémiant. Plusieurs mécanismes d’action entrent en scène et l’on peut se demander dans quelle mesure les effets s’additionnent. Les fibres visqueuses (psyllium, avoine…) augmentent l’excrétion des acides biliaires, les phytostérols réduisent l’absorption intestinale du cholestérol, les protéines de soja réduisent la synthèse hépatique du cholestérol et semblent augmenter le nombre de récepteurs aux LDL. Quant à l’effet hypocholestérolémiant des fruits secs oléagineux (amandes et autres noix), il s’explique notamment par la teneur en huile riche en acides gras mono-insaturés et en stérols végétaux, mais aussi par la présence de fibres, de protéines végétales et autres substances phytochimiques.
Mesures combinées
Une nouvelle étude effectuée par une équipe du St Michael’s Hospital à Toronto (Canada) montre précisément qu’en intégrant plusieurs modifications, les résultats obtenus sont surprenants. L’hypothèse de départ partait du constat suivant : parmi les stratégies alimentaires préconisées pour diminuer le cholestérol, l’Adult Treatment Panel III du National Cholesterol Education Program met l’accent sur la réduction des acides gras saturés et préconise le recours aux esters végétaux et aux fibres visqueuses, alors que l’American Heart Association encourage l’utilisation des protéines de soja et de noix en tout genre. Quel est le résultat d’une approche qui intègre simultanément tous ces éléments ?
Pour répondre à cette question, 46 femmes et hommes adultes (âge moyen = 59 ans, BMI moyenne = 27,6) présentant une hyperlipémie ont été répartis, pendant un mois, entre les trois groupes suivants :
Groupe “portfolio”
Groupe “contrôle”
Groupe “statine”
Efficacité redoutable
Avant la période d’intervention, tous les participants suivaient un régime hypolipidique classique, avec moins de 7 % de l’énergie sous forme d’acides gras saturés et moins de 200 mg de cholestérol par jour. Au terme des 4 semaines d’intervention, les résultats indiquent une diminution significative du cholestérol LDL (LDL-C) dans les trois groupes : - 8,0 % dans le groupe “contrôle”, - 30,9 % dans le groupe “statine” et… - 28,6 % dans le groupe “portfolio”. La diminution dans le groupe “portfolio” ne diffère pas de façon significative de celle recensée dans le groupe “statines”. Une telle réduction par l’alimentation ne peut s’expliquer que par un effet additif, tout au moins en partie, des différents constituants pris séparément.
Un autre résultat digne d’intérêt est l’évolution favorable de la protéine réactive C, un marqueur de l’inflammation : - 10,0 % dans le groupe “contrôle”, - 33,3 % dans le groupe “statine” et – 28,2 % dans le groupe “portfolio”. Ici aussi, les résultats des groupes “statine” et “portfolio” ne sont pas statistiquement différents.
Cette étude montre donc que, contrairement à ce qui est de notoriété publique, le potentiel d’un régime basé sur la combinaison de plusieurs mesures hypocholestérolémiantes, peut parfaitement rivaliser avec une approche médicamenteuse. Encore faut-il arriver à mettre pareil régime en oeuvre, ce qui, au niveau des modifications comportementales, est sensiblement plus exigeant que la prise d’un comprimé par jour.
Nicolas Guggenbuhl
Diététicien Nutritionniste
Réf.
Jenkins D J. et al. Effects of a Dietary Portfolio of Cholesterol-lowering Foods vs Lovastatin on Serum Lipids and C-Reactive Protein. JAMA. 2003;290:502-510.