De la vague des produits light, les limonades et autres boissons allégées en sucre sont probablement ceux qui se sont le mieux ancrés dans les nouvelles coutumes. Par rapport à leurs homologues traditionnels, elles peuvent faire valoir une réduction importante de la valeur énergétique. Malgré cette différence importante, l’utilité, pour perdre du poids, de recourir aux édulcorants acaloriques à la place du sucre, ne fait pas l’objet d’un consensus. Compte tenu de l’évolution de la prévalence de l’obésité et de la place grandissante occupée par les limonades, ce n’est pas un luxe de tenter d’y voir plus clair.
Une relation équivoque
Dans le passé, certains travaux ont suggéré que les édulcorants de synthèse stimulaient l’appétit. La plupart des études entreprises depuis le démentent, même si l’on peut souligner que les édulcorants ne contribuent pas, contrairement au sucre, au déclenchement de la satiété. D’autres travaux montrent que la suppression du sucre d’un régime engendre une augmentation de la proportion de lipides et, à long terme, conduit à une augmentation de l’apport énergétique donc à une prise de poids. Certaines études épidémiologiques rapportent même l’existence d’une relation inverse entre la consommation de saccharose et le poids corporel, chez l’adulte comme chez l’enfant.
D’un autre côté, plusieurs études ont déjà montré qu’en cas de restriction énergétique, le recours aux produits édulcorés permet d’améliorer l’adhésion au régime, la qualité de vie et aide à la perte de poids. Mais cela ne permet pas de savoir si les gens qui optent pour des produits édulcorés avec l’espoir de perdre du poids sans modifier leurs ingestats sont sur la bonne voie…
Sucré à volonté !
Pour tenter d’en savoir plus, des chercheurs danois ont entrepris une étude auprès d’hommes et de femmes en excès de poids (BMI > 28 kg/m2) qui, pendant 10 semaines, soit ont consommé une alimentation riche en saccharose (n = 21), soit ont remplacé les produits sucrés par leurs homologues édulcorés, essentiellement sous forme de boissons (n = 20). Précisons qu’il s’agit de la première étude d’intervention à long terme effectuée sans restriction énergétique : autrement dit, les personnes dans le groupe «édulcorants» avaient tout le loisir de compenser cette épargne calorique en mangeant plus.
Dans le groupe « saccharose », l’apport supplémentaire en produits sucrés atteignait 152g de sucre par jour et 3,4 MJ, alors que dans le groupe « édulcorant » les produits ajoutés ne contenaient pas de saccharose et représentaient un complément de 1 MJ par jour.
Adaptation insuffisante
Après 10 semaines, les sujets dans le groupe « saccharose » ont diminué spontanément leur apport énergétique via les autres aliments, mais la consommation calorique globale est restée plus élevée. Cela s’est traduit par une prise de poids de 1,6 kg, dont 1,3 de masse grasse. Les sujets du groupe « édulcorants » ont réduit spontanément leur consommation de sucre et de glucides totaux et ont perdu en moyenne 1kg (dont 0,3 kg de masse grasse). Les auteurs estiment que cette différence s’explique en partie par le fait que l’énergie des liquides (boissons sucrées) exerce un effet moins marqué sur la satiété que les aliments solides, facilitant ainsi la surconsommation d’énergie sous forme de boissons sucrées. De plus, par rapport aux sujets minces, les personnes en excès de poids ont plus de mal à adapter leur apport énergétique en fonction de leur besoin.
Cette étude ne signifie pas que les édulcorants font maigrir, mais elle indique que la substitution de boissons sucrées par leurs homologues « light » est justifiée chez les personnes en excès de poids. Cela ne doit pas faire perdre de vue que l’eau est tout aussi indiquée !
Nicolas Guggenbühl
Diététicien Nutritionniste
Réf. : Raben A et al. Am J Clin Nutr 2002;76:721-9.