Le végétarisme peut revêtir différents habits : au sens strict, il consiste à ne pas consommer d’animaux morts et de produits qui en dérivent. Par contre, les laitages et les œufs sont souvent inclus. Parfois, c’est seulement la viande qui est bannie, poissons et volaille étant admis. Le végétalisme, végétarisme de l’extrême, exclut tout aliment issu du règne animal, ce qui le rend délicat pour ce qui est de la couverture des besoins nutritionnels. L’alimentation végétarienne telle que souvent pratiquée diffère finalement peu d’une alimentation équilibrée et apporte parfois une petite touche santé en plus…
Moins d’IGF-1 chez les “extrêmes”
La faible prévalence de certains cancers « occidentaux » en Asie s’explique probablement un peu par le contenu de l’assiette. L’alimentation traditionnelle s’apparente au végétarisme tel qu’on le connaît dans notre région : poisson, soja, fruits, légumes, céréales et, dans une moindre mesure, lait et œufs, composent l’essentiel du menu.
Une étude anglaise (1) a tenté de déterminer si le facteur de croissance insulin-like growth factor 1 (IGF-1), incriminé dans le développement de certains cancers, pouvait être influencé par des régimes végétalien et lacto-ovo-végétarien (LOV) en comparaison d’une alimentation « riche » en viande. L’analyse sanguine de 292 femmes britanniques, parmi lesquelles 92 végétaliennes, 101 végétariennes et 99 omnivores, révèle que la consommation exclusive de végétaux est associée à un taux plasmatique d’IGF-1 plus bas (- 13 % par rapport aux carnivores), rien n’étant décelé chez les LOV. Cette valeur plus basse du facteur de croissance hormonal résulterait de la pauvreté du régime végétalien en acides aminés essentiels. Un argument supplémentaire pour réduire notre consommation pléthorique de protéines animales ?
De l’Oncle Sam à Albion, avant Bruxelles ?
L’effet hypocholestérolémiant du soja est largement reconnu mais, contrairement aux Etats-Unis, l’Europe bute toujours sur les allégations de santé. Le Joint Health Claims Initiative (JHCI), une organisation non-gouvernementale indépendante britannique, a autorisé fin juillet 2002 une allégation de santé pour les produits à base de soja et leurs dérivés. A l’instar de son homologue américaine (la FDA), celle-ci stipule que : « l’inclusion de 25 g de protéines de soja par jour, associée à une alimentation pauvre en acides gras saturés, peut aider à réduire le taux de cholestérol ». Les produits arborant cette allégation devront contenir au minimum 6.25 g de protéines de soja par portion et peu d’acides gras saturés. Ils devront également avertir le consommateur sur le contenu en protéines de soja par portion. Les regards sont maintenant tournés vers Bruxelles… N.R. |
Végétal et bon cholestérol
Une seconde recherche anglo-saxonne (2) rapporte les changements bénéfiques obtenus sur le profil lipidique par le basculement d’un régime « carnassier » vers une alimentation de type végétarien. Les volontaires, 12 hommes et 31 femmes âgés de 18 à 42 ans, ont été suivis pendant 6 mois. L’adoption du régime végétarien a, en premier lieu, amélioré l’équilibre de l’assiette : l’apport énergétique total et celui dérivé des acides gras saturés a sensiblement diminué, au profit d’un apport plus élevé de glucides, principalement complexes. Privilégier le règne végétal n’abaissait pas le cholestérol total ou les triglycérides sanguins, mais provoquait une augmentation importante du cholestérol HDL (+ 21 % ; 1.21 mmol/l vs 1,47 mmol/l).
Plus d’hyperhomocystéinémie !
Selon une étude slovaque (3), l’impact de la carence en vitamine B12 observée chez les végétariens, mais surtout chez les végétaliens, ne se limite pas à l’hématopoïèse. Dans cet essai, les taux plasmatiques des vitamines B6, B9 et B12 de 39 végétariens ou végétaliens ont été confrontés à ceux de 35 adultes omnivores. Les végétariens et les végétaliens présentaient une homocystéinémie moyenne plus élevée (respectivement 12.9 µmol/l et 17.2 µmol/l) en comparaison du groupe contrôle (9.9 µmol/l). Les « phytophages » ne présentaient pas de carences en vitamines B6 et B9 (contre respectivement 60 % et 16 % dans le groupe contrôle). Par contre, la déficience en cobalamine concernait 67 % des végétaliens et 32 % des végétariens, et ne se retrouvait pas parmi les omnivores. De par la richesse en végétaux de leur alimentation, les végétaliens et végétariens bénéficient d’un apport important en B9, ce qui, sur le plan métabolique, est favorable à la réduction de l’homocystéine. Toutefois, il semble bien dans ce cas que l’apport insuffisant en B12 (celle-ci intervenant aussi dans la reconversion de l’homocystéine en méthionine), fasse perdre tout bénéfice de l’apport en folate. On ne peut pas réclamer le beurre et l’argent du beurre…
Nicolas Rousseau
Diététicien Nutritionniste
Réf.
(1) Allen NE et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 2002 ; 11(11) : 1441-8
(2) Robinson F J et al. Hum Nutr Diet 2002 ; 15(5) : 323-9
(3) Krajcovicova M et al. Cas Lek Cesk 2002 ; 141(13) :417-20