La conférence européenne “nutrition et cancer” qui s’est tenue à Lyon du 21 au 24 juin dernier a permis à 350 chercheurs de faire le point sur l’association entre l’état nutritionnel, l’équilibre métabolique et la formation de carcinomes de divers types. Les résultats préliminaires du réseau européen d’études prospectives “alimentation et cancer” (EPIC) confirment certaines observations antérieures et ouvrent également la voie à de nouvelles hypothèses.
Réduire l’incidence de moitié
Pour rappel, EPIC est la plus grande étude jamais menée sur les rapports entre alimentation et cancer, sur base d’un échantillon de plus de 500 000 sujets répartis dans 10 pays européens. Elle a pour objectif de mettre en évidence les liens de cause à effet entre l’équilibre alimentaire, les données anthropométriques, l’activité physique, les facteurs hormonaux ainsi que la prédisposition génétique et l’apparition de certains cancers. L’étude EPIC confirme une fois de plus, l’effet bénéfique des végétaux : une consommation même modérée de fruits et de légumes est associée à une réduction de l’incidence des cancers du côlon, du rectum et des voies aéro-digestives supérieures. Il suffirait d’ingérer 500 g de fruits et légumes par jour pour réduire de 50 % l’incidence de ces cancers. En revanche, l’effet protecteur observé antérieurement pour les cancers de l’estomac et du poumon n’a pas été observé; il faut noter cependant que le nombre de cas de cancer survenus au niveau de ces deux sites au cours de la période de suivi – encore relativement courte - est faible.
Le steak respire, les salaisons voient rouge
Les résultats concernant la viande rouge sont au menu des surprises. Ainsi, il ressort très nettement que la consommation de viande rouge n’est pas associée au risque de développer un cancer du côlon ou du rectum. De même, la consommation de volaille ne semble pas dangereuse, elle semble même associée à une faible réduction du risque de cancer. La situation est moins rose pour la charcuterie, dont la consommation élevée induirait une augmentation du risque de cancer du côlon.
Notons toutefois que ces analyses n’ont pas encore pu prendre en compte le mode de cuisson des viandes. Cette importante composante sera traitée avec minutie dans le futur. Une association positive entre la consommation totale de viande et le cancer de l’estomac et des voies aéro-digestives supérieures a été observée mais elle n’est pas significative; elle fera l’objet d’analyses ultérieures.
Du côté du poisson, les nouvelles sont bonnes : les chercheurs constatent une réduction significative du risque de cancer du côlon et du rectum pour des consommations élevées de poisson. Soulignons une fois encore que les méthodes de cuisson et de stockage de cet aliment devront faire l’objet d’études ultérieures.
Association de malfaiteurs
Les résultats d’EPIC confirment l’effet dévastateur de l’alcool et du tabac sur les cancers des voies digestives supérieures. Pour donner quelques chiffres, un consommateur de plus d’un paquet de cigarettes par jour verrait son risque de contracter un de ces cancers multiplié par 8 ! Une consommation d’éthanol supérieure à 60 g par jour (approximativement une bouteille de vin de 75 cl) induirait un accroissement du même risque d’un facteur 9 ! L’effet de ces deux facteurs étant synergique, le fumeur buveur multiplierait son risque de contracter un de ces cancers par 50 ! Ceci confirme les résultats obtenus par une équipe du Centre International de Recherche sur le Cancer il y a plus de 15 ans à propos des cancers du larynx et de l’œsophage dans les pays de l’Europe méridionale. En marge des bienfaits d’une alimentation riche en poisson, fruits et légumes, l’importance d’une activité physique régulière et la prévention de l’obésité méritent de figurer aux premières loges de la prévention du cancer
V. Wilpart
Diététicienne