« Policosanol », de quoi s’agit-il ? D’un mélange d’alcools gras à longue chaîne de carbone qui est obtenu par extraction de la matière cireuse de la canne a sucre. Originaire de Cuba, il est commercialisé dans plus de 40 pays, en particulier – mais pas uniquement – pour ses prétendues vertus hypocholestérolémiantes. On lui prête également des effets antithrombotiques, de stabilisation de la plaque d’athérome et une action antioxydante. En Amérique du Sud, il a aussi la réputation d’améliorer les performances sexuelles.
Des études pour témoin
Le Policosanol peut aussi être produit à partir d’autres sources, comme le germe de blé, le son de riz ou la cire d’abeille. La publicité revendique est effet hypocholestérolémiant « bien documenté » qui repose sur « plus de 80 études scientifiques ». Cet effet serait, à un dosage de 5 à 40 mg par jour, comparable à celui des statines…
Il est vrai que la littérature scientifique existe, mais il faut préciser que la plupart des études en faveur des bénéfices du Policosanol sur les lipides sanguins proviennent d’un seul et unique groupe de recherche de Cuba. La portée scientifique est donc relative, puisque les effets ne sont pas confirmés par d’autres travaux menés ailleurs. Un essai clinique réalisé aux Pays-Bas avait évalué le Policosanol de germe de blé. Il montrait que l’extrait était inefficace pour réduire le taux de cholestérol total ainsi que le LDL. Certains ont interprété ces résultats comme la preuve de la supériorité du Policosanol de Cuba. D’où l’intérêt de cette nouvelle étude, un essai randomisé contre placebo, réalisé hors des frontières de Cuba, avec le fameux Policosanol cubain.
Cinq groupes pour cobayes
Le Dr Berthold, de l’Université de Cologne, en Allemagne, est ses collèges, ont mis en place une étude multicentrique, randomisée, menées en double aveugle et avec un groupe placebo, incluant 143 personnes avec une hypercholestérolémie ou une dyslipidémie caractérisée soit par un LDL supérieur à 150 mg/dl (3,88 mmol/l) avec aucun ou un facteur de risque cardiovasculaire autre qu’une maladie coronarienne connue, soit par un LDL entre 150 et 189 mg/dl et au moins 2 facteurs de risque.
Cinq groupes ont été formés, afin d’évaluer l’effet de différentes doses du Policosanol : 10, 20, 40, 80 mg/jour ou un placebo. L’inventaire est réalisé après une période 12 mois de traitement. Résultat : dans aucun des 5 groupes, le LDL n’a diminué de plus de 10 % par rapport au départ. Au final, il n’y a pas la moindre différence significative entre le Policosanol et le placebo sur le cholestérol total, le HDL, le LDL, les triglycérides, la lipoprotéine (a) et le rapport LDL/HDL.
Inoffensif et inefficace
Bien que l’on ne puisse pas rejeter en bloc tout intérêt du Policosanol, cette étude sème un fameux pavé dans la mare aux aspirations de l’extrait de canne cubain. Certes, l’étude montre aussi qu’il est bien toléré, et qu’il ne fait l’objet d’aucun effet secondaire, des arguments de choix pour recruter des clients en quête de remèdes alternatifs. Mais il semble néanmoins qu’il faille garder la tête froide face aux revendications de tels prétendus remèdes, dont le principal danger réside surtout dans le fossé qui sépare ce que l’on croit qu’il fait (réduire un facteur de risque)… et ce qu’il ne fait pas.
Nicolas Guggenbühl
Diététicien Nutritionniste
Berthold HK et al. JAMA 2006;295:2262-2269.