Pas très gaie, cette affection qu'on appelle la cirrhose du foie. Cette maladie, une fois qu'elle est apparue, évolue inévitablement vers l'aggravation et parfois même jusqu'à la mort au bout de quinze à vingt ans, parfois moins. En fait, il s'agit d'un processus de réparation du foie, après destruction d'un grand nombre de ses cellules. Mais la réparation ne se fait pas bien et, en plus de cela, elle s'emballe. Le sang ne passe plus bien à travers le foie et doit refluer par d'autres voies pour retourner au coeur: il suit les veines qui entourent l'oesophage. Celles-ci se dilatent et développent des varices. Lorsque les varices de l'oesophage se rompent, c'est l'hémorragie catastrophique, encore souvent mortelle de nos jours. Quant au foie lui-même, il est de moins en moins capable d'assurer nos besoins vitaux. Et si tout cela n'arrive pas, la cirrhose fait le lit du cancer du foie.
Pas seulement l'alcool
En fait, tous les acteurs qui peuvent tuer des cellules du foie peuvent être des causes de cirrhose. Tout le monde connaît le cas de l'alcool. On sait peut-être moins que c'est aussi le cas des virus : après une hépatite, surtout l'hépatite B et la C, le processus peut se mettre en route et aboutir en dix, quinze ou vingt ans, aux drames décrits dans les lignes qui précèdent. Par contre, on sait beaucoup moins que le risque est le même avec la graisse. La personne en excès de poids (syndrome métabolique) accumule de la graisse dans son foie, exactement comme les oies que l'on gave en vue du festin de Noël. Les médecins appellent cela de la stéatose. Et cette graisse, si elle est trop abondante, tue des cellules du foie. On l'a compris : la personne en syndrome métabolique, en surpoids ou obèse, risque le même phénomène.
Un vaste sujet d'étude
La stéatose non alcoolique est très étudiée depuis quelques années. En fin de compte, quoi qu'on pense, elle est la première cause d'atteinte hépatique chronique. Aux Etats-Unis, où le tour de taille moyen est de plus en plus impressionnant, cette maladie du foie touche, estime-t-on, environ 30% de la population. Et sa relation avec le syndrome métabolique est de plus en plus évidente : plus de 90% des personnes atteintes de stéatose hépatique non alcoolique ont au moins une des caractéristiques du syndrome métabolique et une sur trois présente le tableau complet. C'est au point que l'on commence à considérer, parmi les experts, que cette atteinte hépatique est carrément une des composantes du syndrome métabolique lui-même. Plus encore, on commence à se rendre compte qu'il y a un lien entre l'atteinte du foie, un léger degré d'inflammation générale et un stress oxydant augmenté. Et comme on l'adit pour le risque cardiovasculaire, le risque se stéatose, puis de cirrhose hépatique, est surtout lié à la graisse intra-abdominale.
Pas de traitement
Le problème est qu'on n'a pas de traitement spécifique de l'atteinte du foie. Il faut traiter le syndrome métabolique en rééquilibrant son alimentation, en perdant du poids, en faisant de l'exercice, en prenant des médicaments qui font baisser le taux de lipides dans le sang et d'autres qui diminuent le risque de thrombose et d'embolie. Bref, il faut traiter le risque cardiovasculaire. Cela fait reculer la stéatose si elle n'est qu'à son début. Cela permet de freiner son évolution si elle est déjà bien installée. Mais dans ce deuxième cas, il n'est plus possible de l'arrêter.
Dr J. Andris
Référence:
Rector RS, Thyfault J, Wei Y et al. World J Gastroenterol 2008 ; 14(2) :185-92.