L’autre protection cardiaque

Malgré les mesures préventives actuelles, il persiste un risque cardiovasculaire, dit résiduel. Une nouvelle piste de prévention s’est ouverte avec la supplémentation conjointe en sélénium et coenzyme Q10. Les arguments théoriques à leur appui sont solides et une étude prospective d’envergure, KiSel-10, vient d’apporter des résultats positifs.

On connaît l’importance du sélénium dans l’organisme en tant qu’antioxydant et stimulant de l’immunité. Des apports de suppléments en sélénium (Se) ont montré leur capacité à moduler la réaction inflammatoire. Il semble toutefois, selon certaines études, que les apports nutritionnels en cet élément ne soient pas suffisants et plusieurs études ont conclu à l’existence d’une relation entre maladie cardiaque ischémique et insuffisance en sélénium. La coenzyme Q10 (CoQ10) est importante elle aussi dans les processus de protection cellulaire, notamment contre la lipoperoxydation. Ici encore, des taux faibles de CoQ10 ont été enregistrés en cas de cardiomyopathie. On a donc montré que la teneur était faible dans le cœur des patients souffrant de cardiomyopathie mais les études qui se sont intéressées à l’effet d’une supplémentation en chacun de ces deux composants pris séparément ont donné des résultats discordants. Ils sont pourtant en relation étroite sur le plan fonctionnel. Et malgré cela, on n’avait pas encore étudié l’effet d’une supplémentation conjointe avec les deux..

Démonstration

C’est maintenant chose faite, avec la toute récente publication online de l’International Journal of Cardiology, d’une étude prospective de 5 ans, KiSel-10, en double aveugle, et contrôlée contre placebo, qui a enrôlé 443 personnes âgées de 70 à 80 ans. Ces volontaires ont reçu soit la double supplémentation, soit un placebo pendant toute la durée de l’étude. Des examens cliniques ont été conduits au début de l’étude et ensuite tous les six mois, avec échographie, électrocardiogramme et mesure de marqueurs biologiques de la fonction cardiaque. Parmi les marqueurs en question figurait le peptide N-terminal du proBNP (NT-proBNP). Ces examens ont été réalisés au début de l’étude et tous les six moins au cours de celle-ci. La mortalité des participants a été suivie également. L’objectif de l’étude était en effet d’évaluer l’influence de cette supplémentation sur la mortalité cardiaque après ajustement pour les facteurs confondants.

Mortalité réduite

Au bout de 5,2 années d’observation, une réduction significative de la mortalité cardiovasculaire était enregistrée dans le groupe traité par rapport au groupe témoin. La mortalité cardiaque avait été de 5,9% sous la double supplémentation, contre 12,65 dans l’autre groupe (p = 0,015). Les taux de NT-proBNP étaient significativement plus faibles chez les personnes qui avaient pris du sélénium et de la CoQ10 simultanément: les valeurs moyennes à quatre ans étaient de 214 ng/L contre 302 ng/L dans le groupe contrôle p = 0,014). A l’échographie aussi, la différence se marquait: la fonction cardiaque était meilleure sous supplément de Se et CoQ10 que sous placebo ( p = 0.03). la fraction d’éjection ventriculaire gauche, témoin de l’efficacité de la fonction cardiaque, s’est avérée significativement meilleure à la fin de l’étude chez les patients qui avaient reçu une supplémentation. Il s’avère donc que la supplémentation à long terme avec un double apport en sélénium et Coenzyme Q10 vitamine réduit la mortalité cardiovasculaire.