Les relations entre la richesse en lipides ou graisses de l'alimentation et la survenue d'un cancer du sein ainsi que le risque de récurrence d'un tel cancer restent obscures. Il existe cependant suffisamment d'arguments suggérant qu'une alimentation grasse peut augmenter le risque d'un tel cancer, et que cela vaut la peine de vérifier l'hypothèse selon laquelle une réduction de l'apport lipidique peut être bénéfique chez les femmes ayant été traitées pour un cancer du sein. C'est précisément l'objet de l'étude menée par Rowan Chlebowski, du Los Angeles Biomedical Research Institute à la Harbor-University of California, auprès de 2437 femmes ayant été traitées pour un cancer du sein détecté à un stade précoce.
Les femmes, issues de l'étude WINS (Women's Intervention Nutrition Study), ont été réparties dans deux groupes : tous deux bénéficiaient de conseils en matière d'alimentation équilibrée, mais sans aller plus loin pour le groupe contrôle, alors que pour le groupe « intervention », l'objectif diététique consistait à descendre l'apport en lipides à 15 % de l'énergie (ce qui est sévère). Les femmes du groupe intervention ont eu 8 consultations diététiques d'une heure pour les aider à aménager leur nouvelle façon de se nourrir. De plus, elles pouvaient assister à des sessions en groupes qui se tenaient de façon mensuelle.
Moins 24 %
Au début de l'étude, les deux groupes ingéraient la même quantité de graisses (56 - 57 grammes par jour, soit environ 30 % de l'apport énergétique, ce qui est déjà relativement peu). Après un an, cet apport est passé à 33 g par jour (20,3 % de l'énergie) dans le groupe intervention, contre 51 g (29,2 % de l'énergie) dans le groupe contrôle.
Après une période de suivi moyen de 5 ans, l'heure est au bilan. Le nombre de récurrences est significativement plus faible dans le groupe intervention (9,8 %) que dans le groupe contrôle (12,4 %). Les auteurs calculent que les femmes du groupe intervention ont un risque de rechute qui est 24 % plus faible que celles du groupe contrôle.
Un éditorial consacré à cette étude pointe néanmoins le caractère contraignant d'une telle réduction des lipides, et la fait que le rôle des lipides n'est toujours pas clairement identifié : en effet, alors que le poids moyen des femmes était comparable au début du suivi, celui du groupe intervention était inférieur d'environ 3 kg que celui du groupe contrôle après 5 ans, ce qui peut aussi avoir eu un effet sur les résultats observés.
Nicolas Guggenbühl
Diététicien nutritionniste
Référence : Chlebowski RT et al. J Natl Cancer Inst 2006 ;98 :1767-76.