Cela fait bien longtemps que la viande est accusée de favoriser le développement de certains cancers, en particulier celui du côlon. Mais les arguments scientifiques ont souvent été biaisés par l’apport en graisses saturées, qui va souvent de pair avec l’apport en viande, et influence à lui seul le risque de cancers.
Une équipe de l’American Cancer Society, à Atlanta, a examiné la relation entre la consommation à long terme de viandes et le risque de cancer du côlon et du rectum. L’étude porte sur près de 150 000 adultes âgés de 50 à 74, issus de 21 états. Une première évaluation de la consommation de viandes a été faite en 1982, une seconde entre 1992 et 1993, lorsque les participants ont été enrôlés dans l’étude CPS II (Cancer Prevention Study II). Au 31 août 2001, 1667 cas de cancers recto-coliques ont été diagnostiqués.
Risque accru de 50 %
Les résultats montrent que les personnes se situant dans le tertile le plus élevé pour la consommation de viandes rouges et de viandes transformées (charcuteries…) depuis 1982 ont un risque de cancer du côlon distal (la section proche du rectum) qui est augmenté de 50 %, par rapport à ceux qui en mangent le moins. Ceux avec le rapport viande rouge/volaille et poisson le plus élevé voient leur risque augmenté de 53 %. A l’inverse, la consommation à long terme de volaille et de poisson est inversement associée au risque de cancer du côlon proximal et distal. Pour le cancer du rectum, une consommation élevée de viande rouge en 92/93 est associée à une augmentation du risque de cancer de 71 %.
Bien que ces résultats soient loin d’être roses pour la viande, Walter Willett, de l’école de santé publique de Harvard, précise dans un éditorial que la saga viande rouge et cancer n’est pas terminée, et que d’autres études à long terme, prenant notamment en compte les modes de cuisson, sont nécessaires.
Il ne s’agit pas de supprimer purement et simplement la viande rouge et les viandes transformées, mais cette étude vient conforter l’adoption d’une alimentation proche du modèle méditerranéen, avec moins de viande rouge, plus de volaille et de poisson. Fort heureusement, précise le célèbre épidémiologiste, remplacer du bœuf rôti et de la purée par du saumon en croûte aux pistaches et un pilaf de riz basmati brun n’est pas un sacrifice culinaire !
Nicolas Guggenbühl
Diététicien Nutritionniste
Références :
JAMA du 12 janvier 2005