Le poisson, c'est bon, surtout lorsqu'il est gras : il contient de précieux oméga-3 dont les bienfaits, notamment dans le domaine cardiovasculaire, sont unanimement reconnus. Et le saumon fait partie des bonnes sources d'oméga-3. Autrefois rare et cher, cet aliment a été rendu nettement plus abordable grâce à l'élevage. Oui mais, le saumon est un animal carnivore qui concentre certaines toxines, dont les PCB (polychlorobiphényles) et autres dioxines. Une étude plus conséquente publiée récemment dans Science suggère qu'il vaut mieux fuir les saumons, surtout ceux retrouvés sur nos étals…
Deux tonnes à l'analyse
Les auteurs de l'étude ont analysé deux tonnes de saumon d'origine diverse, pour déterminer la contamination par les substances organochlorées. Les résultats montrent que les saumons d'élevage sont sensiblement plus contaminés que les saumons sauvages (A noter que ce n'est pas parce qu'il y a indiqué " saumon atlantique " sur l'étiquette qu'il s'agit d'un saumon sauvage !). Deuxièmement, les saumons élevés dans le Nord de l'Europe, en particulier ceux provenant d'Ecosse, sont plus contaminés que ceux élevés en Amérique du Nord et du Sud.
Voilà pour les faits, vient ensuite l'analyse du risque et les conclusions des auteurs : il ne faudrait pas manger du saumon d'élevage plus d'une fois par mois, et pas plus de deux fois par mois s'il s'agit de saumon d'Europe du Nord.
Précisons que dans leur analyse du risque, les auteurs ont utilisé comme références les recommandations de l'Agence américaine pour la protection de l'environnement (US-EPA), qui sont particulièrement sévères.
Une question de normes
Le problème des PCB dans la chaîne alimentaire et dans les poissons gras (les PCB sont solubles dans la graisse et s'y concentrent) n'est pas nouveau et plusieurs travaux ont déjà confirmé leur présence dans le saumon. Suite à cette publication relativement alarmiste pour le saumon, surtout le consommateur européen, les autorités britanniques n'ont pas tardé à réagir au travers de la Food Standards Agency (FSA -www.foodstandards.gov ). Celle-ci précise que les niveaux de PCB et de dioxines retrouvés dans l'étude de Science correspondent à ceux retrouvés précédemment par la FSA et qu'ils sont inférieurs aux niveaux de sécurité actuels fixés tant par l'Organisation Mondiale la Santé que ceux de la Commission Européenne. Et ce, qu'il s'agisse de saumons sauvages, d'élevages, même Ecossais.
Même si l'on ne peut que souhaiter que la teneur en PCB et dioxine soit la plus basse possible, il semble donc prématuré de remettre en question le bien-fondé de la consommation de poisson gras, y compris de celle du saumon d'élevage.
Nicolas Guggenbühl
Diététicien Nutritionniste
Ref. :
Hites RA et al. Science, 9 janvier 2004