Les bactéries et leur implication dans les épisodes de toxi-infections alimentaires constituent une menace quotidienne. Le risque est d'autant plus grand que les denrées ont été manipulées, ce qui concerne une partie de plus en plus importante de notre approvisionnement. Le lavage des mains, le nettoyage des ustensiles et du plan de travail constituent des mesures préventives de base, tout comme la conservation des aliments à bonne température.
La croissance de la plupart des bactéries est ralentie, voire stoppée à des températures de 0 à 4 ° C. C'est ce qui explique que le froid représente un moyen efficace pour conserver les aliments. L'invention du réfrigérateur a véritablement amélioré notre mode de vie. Il permet bien sûr une meilleure conservation des denrées alimentaires, mais aussi l'accès à une multitude de produits frais et variés. Sa généralisation dans les foyers est reconnue comme un élément important ayant contribué à diminuer les cas d'infections alimentaires. Mais il semble qu'il y ait un revers à la médaille…. Des chercheurs français suggèrent que le développement de la réfrigération a favorisé l'apparition de la maladie de Crohn.
Bactéries psychrotrophes
La maladie de Crohn est une maladie inflammatoire chronique qui atteint l'intestin, sa cause reste encore méconnue. Certains facteurs environnementaux tels que l'alimentation, le mode de vie, le tabagisme, et surtout une susceptibilité génétique individuelle prédisposent à cette affection.
Sur base des données épidémiologiques, les auteurs relèvent que tout converge pour considérer la réfrigération comme un facteur de risque potentiel de la maladie de Crohn. De plus, ils notent que le développement de la chaîne du froid au XXe siècle coïncide avec l'éruption de l'affection. Ils émettent ainsi l'hypothèse de la chaîne de froid : certaines bactéries pouvant se développer aux températures du réfrigérateur seraient impliquées dans la maladie de Crohn.
Les bactéries incriminées sont dites " psychrotrophes " : elles apprécient les basses températures, comme celles du réfrigérateur. Parmi celles qui joueraient un rôle dans la pathologie, les auteurs citent Listeria monocytogenes et le genre Yersinia. Ces bactéries se retrouvent dans le bœuf, le porc, le poulet, la charcuterie, les fromages et la laitue. Elles ont d'ailleurs été retrouvées dans des lésions liées à la maladie. Cette nouvelle hypothèse ne doit cependant pas inciter à remonter la température du frigo !
Nicolas Guggenbühl, Diététicien Nutritionniste, et Emmanuella Mollet
Ref. :
Hugot J-P et al. Lancet, 2003;362:2012-15.