Cela fait des années que la vitamine E et le bêta-carotène ou pro-vitamine A nourrissent bien des espoirs en matière de prévention des affections, notamment dans le domaine cardiovasculaire. Leur propriété antioxydante et leur caractère liposoluble leur confère la capacité à freiner l'oxydation du cholestérol LDL, un mécanisme par lequel ils contribueraient à lutter contre l'athérosclérose, donc les maladies cardiovasculaires. Mais jusqu'à présent, hormis les constats émanant de l'épidémiologie où vitamine E et/ou bêta-carotène ont été associées à une survenue plus faible d'évènements cardiovasculaires, les études cliniques ont apporté des résultats très mitigés.
Pour faire le point sur ce sujet, Marc S Penn, de la Cleveland Clinic Foundation, aux Etats-Unis, et ses collègues ont effectué une méta-analyse sur base des grands travaux effectués à ce jour. Ils ont pris en compte les données concernant 7 études randomisées pour la supplémentation en vitamine E et portant sur un total de 81 788 patients et 8 études randomisées pour la supplémentation en bêta-carotène, regroupant 138 113 patients. La période de suivi s'étalait de 1,4 à 12 ans.
Fin de carrière ?
Résultats : la vitamine E n'apporte pas le moindre bénéfice par rapport à ceux qui n'en prennent pas, cela tant pour ce qui est de la mortalité cardiovasculaire que pour la mortalité toutes causes confondues ou encore pour la survenue d'accident vasculaire cérébral. C'est encore pire pour le bêta-carotène : celui-ci s'avère augmenter légèrement, mais de façon néanmoins significative, la mortalité totale et la mort d'origine cardiovasculaire.
Pour Marc S Penn, compte tenu des résultats de cette méta-analyse, l'utilisation de suppléments vitaminiques contenant du bêta-carotène et/ou de la vitamine A devrait être activement découragée. Les auteurs préconisent aussi purement et simplement l'arrêt des études clinique en cours qui utilisent du bêta-carotène. Ils s'opposent aussi à l'utilisation de la vitamine E en tant que traitement continu et plaident en faveur de son abandon dans les études à venir portant sur des patients à risque élevé de maladie coronarienne. Bref, une sorte de fin de carrière dans le domaine cardiovasculaire qui fera certainement des vagues.
Nicolas Guggenbühl
Diététicien Nutritionniste
Réf :
Vivekananthan DP et al. Lancet 2003;36 :2017-23.